Titre en français : | Presque rien no 2, ainsi continue la nuit dans ma tête multiple |
Année de composition : | 1977 |
Durée : | 21min 28s |
Notice (fr) : | Composé en 1977, Presque rien no 2, ainsi continue la nuit dans ma tête multiple inverse carrément, à tous les niveaux, la proposition du premier Presque rien. D’abord, parce que, cette fois, les micros et le magnétophone ne sont pas fixes: ils vont à la rencontre des différents éléments qui constituent le paysage sonore. Ensuite, parce que le compositeur, accompagné de sa complice Brunhild, commente son errance, ses déplacements et ses recherches. Certes, ces paroles dites à mi-voix sont des plus parcimonieuses afin de ne pas détruire la magie de ce qui est donné à entendre, mais il n’empêche que cette fois, l’auditeur n’est plus seul: la visite est guidée et la présence du chasseur de sons, clairement marquée. Bien plus encore. Après une longue séquence durant laquelle on découvre les différents sons d’un paysage nocturne–grillons, oiseaux de nuit, cloche au loin, aboiements d’un chien, symphonie d’insectes, solos d’un oiseau, d’un insecte dans les herbes–tout se met brusquement à changer. La nuit a surpris le compositeur, pénétré dans sa tête et, au cours de son travail en studio, celui-ci laisse tout à coup libre cours à sa subjectivité, modifie le paysage de la nuit extérieure en une sorte de «psychanalyse de son propre paysage de nuit». Un fantasme qui se poursuivra jusqu’à un délire cauchemardesque d’orage, de pluie et de notes électroniques assenées avec insistance. L’immersion dans un cadre naturel idyllique n’a pu conjurer la violence, les guerres et les injustices qui nous entourent, que le temps d’une vision d’espoir sous les étoiles. Après l’avoir terminé, Luc Ferrari a jugé ce Presque rien no 2 trop intime pour le rendre public, et c’est seulement deux ans plus tard qu’il a admis qu’«il n’y avait aucune raison que cette nuit secrète ne voit pas le soleil». Cette fois encore, on est frappé par la façon proprement musicale dont s’enchaînent, se superposent et s’articulent les éléments sonores, d’un bout à l’autre de la pièce. La réussite d’une œuvre artistique, quelle qu’elle soit, tient toujours d’une dialectique entre des forces contraires, jeu d’autant plus efficient qu’on le ressent plutôt qu’on ne l’analyse clairement sur le coup. En ce qui concerne les Presque rien de Luc Ferrari, une clef peut être donnée par une œuvre antérieure, Music Promenade, réalisée en 1969 pour quatre bandes magnétiques comportant des enregistrements différents et passant simultanément sur quatre magnétophones indépendants. Fragments de musique de défilé militaire, de sirène d’usine, de musique folklorique, de valse de Strauss, de bribes de conversation et de rires féminins, d’explosions et de discours politique, pris sur le vif en Autriche, en Allemagne, en Yougoslavie, en Angleterre, en France et au Portugal: au fil du hasard des interactions entre les quatre bandes magnétiques, apparaissent des télescopages successifs d’images sonores. Si une continuité musicale se dégage cependant de ces rencontres, c’est, d’une part, que les éléments enregistrés sur les bandes ont été soigneusement choisis et, d’autre part, qu’ils sont le plus souvent donnés à réentendre, l’organisation générale de l’œuvre répondant à un principe de superposition de cycles. Alors que les minimalistes américains utilisent des processus de répétition afin de produire des effets hypnotiques détournant l’attention de tout ce qui n’est pas directement lié à ces processus, Luc Ferrari y voit au contraire un moyen naturel d’articuler de façon polyphonique des éléments sonores empruntés à la vie. Aisément perceptible dans Music Promenade—«tourbillon de militaires et d’industries au milieu duquel on entrevoit un folklore agonisant et une jeune fille perdue»—ce principe sera repris d’une manière plus secrète, plus mystérieuse, dans les Presque rien. C’est dans cet entre-deux entre l’observation de la vie et une organisation subtilement musicale des sons que se situe l’art du compositeur. Dans un texte récent qui, sous le titre de Je courais tant de buts divers, cherche à mettre de l’ordre dans un parcours confus, Luc Ferrari parle lui-même de «narration diffuse», de «magnétophone stylo» et de «transformation de la répétition». |
Notice (en) : | In “Presque rien no 2” the microphones and tape recorder go out in search of the different elements that make up the ‘soundscape’. The composer, along with his ‘abetter’ Brunhild, comments on his rovings, his movements, his aims. Admittedly, the words are hushed, confiding, as it were, and are as sparing as possible so as not to destroy the magic of the piece. Nevertheless the listener is not alone: he is accompanied on a guided tour and the presence of the roving recorder is made quite clear. After a long sequence, during which we discover the various sounds of a nocturnal landscape — crickets, night birds, a distant bell, a dog barking, a symphony of insects… suddenly everything begins to change. The night has caught the composer unawares, making its way into his head, and in the course of his work in the studio, he suddenly gives free rein to his subjectivity, transforms the landscape of the night outside into a sort of ‘psychoanalysis of his own landscape at night’. This phantasm continues, reaching its peak in a nightmarish frenzy of storm and rain, and an insistent beating of electric notes. Absorption in an idyllic natural setting could only avert the violence, wars and injustice that surround us just long enough to provide a glimpse of hope beneath the stars. |
Rédacteur (fr) : | [source: reseauxconcerts.com] |
Rédacteur (en) : | [source: reseauxconcerts.com] |
Exécutions : | 22020, 22090 |
Nom | Part | Fonction | Id éditeur | Genre |
Luc Ferrari | 100% | Compositeur | M |