Notice (fr) : |
Ce «Message à la mer» s’inscrit dans les deux acceptions du terme «à». À commencer par le message «destiné» à la mer, comme un murmure des passions humaines que l’on confie à l’océan, surface muette infinie où la vie pourtant s’agite en profondeur; ensuite ces messages écrits sur papier, enfermés dans une bouteille lancée dans les flots afin que ceux-ci les transmettent à un destinataire du bout du monde. Peut-être du Brésil vers l’Europe et vice-versa? Jeu métaphorique qui se révélera au gré d’une partition écrite suite à mon deuxième séjour brésilien. Pour l’anecdote, j’ai été invité successivement en été 2008 et 2009 pour donner des cours d’analyse et de composition aux Universités de Campinas et de Sao Paulo. L’enjeu de ces classes étant d’offrir une réflexion sur les relations qu’entretiennent les musiques populaires et folkloriques avec les musiques dites «savantes». Dès lors cette pièce fait écho aux nombreuses discussions que j’ai eues avec quelques étudiants passionnés par le sujet. Deux acceptions «messagères», donc deux mouvements basés sur un projet commun organisé autour de la notion de révélation. Tout particulièrement, celle de l’expressivité musicale en ce début de XXIe siècle. Pour y parvenir, la musique prend sa source dans des fragments bruiteux qui peuvent nous rappeler quelques bruits humains (avec ces balayages et autres frottements d’archets sur la caisse ou sur les cordes du violon et du violoncelle; avec aussi ces «toc-toc» étranges sur le bois du piano, ou encore ces sonorités étouffées des cordes graves de l’instrument effleurées par un tissu bienveillant). Du bruit naîtra le son périodique, et avec lui le fragment mélodique. Et pour mieux le faire (re) sentir, émergeront alors des bribes lointaines d’une chanson populaire brésilienne: «Chega de Saudade» (assez de «saudades» — sorte de nostalgie) de Tom Jobim. L’occasion de signaler au passage que tout ce mouvement est construit rigoureusement sur un «pattern» issu de la bossa-nova, qui sera lui aussi révélé au fur et à mesure de la partition. Quant aux fragments dévoilés, mis bout à bout, ils feront naître la mélodie dont l’exégèse expressive envahira le second mouvement. À propos de celui-ci, un travail structurel participera à une autre révélation, la révélation des qualités expressives. Depuis le «marejados» — terme impossible à traduire en français, mais appliqué au mouvement des flots; ainsi qu’aux mouvements des larmes (un écho à mon troisième quatuor «les larmes d’un ange»?) – jusqu’à l’«ensolarada» (un ensoleillement musical révélé par une plénitude harmonique dérivée de la spectralité), pour enfin s’épanouir dans un «appassionata» superposant l’intensité des longues notes d’archets à la virtuosité débordante et jubilante du piano. Musique narrative (non pas dans le sens littéraire du terme, mais dans l’idée d’une narration des événements musicaux); musique expressive; elle témoigne de la richesse des pensées qui peuvent ainsi émerger de la rencontre d’imaginaires culturels multiples à l’œuvre sur notre terre. Ici, la rencontre entre des musiques extraeuropéennes et l’écriture occidentale, une constante de ma production musicale. «Mesagem Ao Mar» est dédié à Julia Tygel, compositrice brésilienne et ethnomusicologue ayant activement participé au programme d’archivage du patrimoine musical des Indiens Timbira, qui m’a fait découvrir de nombreuses et merveilleuses musiques du répertoire brésilien. Elle partage cette dédicace avec les membres du Trio Talweg qui ont créé cette œuvre en septembre 2009 dans le cadre du Festival Emergence. |
Notice (en) : |
Starting with the message “addressed” to the sea. Also, messages written on a slip of paper, whispers of human passions enclosed in a bottle, thrown into the sea so that they will be transmitted to someone at the end of the world. Perhaps from Brazil to Europe and vice versa? Indeed, a score written after my second visit Brazil. I was invited successively in summer 2008 and 2009 to teach composition and analysis at the Universities of Campinas and Sao Paulo. The aim of these classes is to offer a reflection on the relationship between popular and/or folk music with the so-called “learned” style. Therefore this piece echoes the many discussions I have had with some passionate students about that topic. Then, two movements based on a common project organized around the concept of revelation. Especially, that of musical expression originated in the early twenty-first century. To achieve this, the music takes its source in noisy fragments that can remind us of some human sounds—maybe the so-called whispers of human passions (noisy sounds with the bow on the wood or on the strings of the violin and cello, “toc-toc” on the wood of a strange piano, weird sounds from a string of that same piano, played with a tissue). Noisy sounds periodically born, mixed with some melodic fragments. And to make it better, all of that emerges from distant snatches of a Brazilian popular song “Chega de Saudade” (“saudades”—a kind of nostalgia) by Tom Jobim. The whole movement is built strictly on a (rhythmic and harmonic) “pattern” from that bossa nova which will also be revealed at certain bars of the score. As the fragments are revealed, the expressivity of these “objects” creates progressively a need for a second movement. About the latter, structural work to attend another revelation—revelation of expressive qualities. From the “marejados”—a term impossible to translate into English, referring to a kind of human wave, as well as movements of tears (maybe an echo of my Third Quartet Les Larmes d'un Ange [Tears of an angel]?)—until the “ensolarada” (a musical sunshine revealed by some harmonic fields determined by spectrality), to finally blossom into an “appassionata”, intense with its long notes spread over the exuberant virtuoso and jubilant piano. Narrative music (not in the literal sense of the word, but the idea of |