Informations
Titre en français : La Péri ou La Fleur d’immortalité
Année de composition : 1911
Instrumentation (fr) : orchestre
Instrumentation (en) : orchestra
Notice (fr) :

Ce poème dansé, en un tableau, et donné en première audition, est dédié à Mlle Trouhanowa. En voici le texte inspirateur : « Il advint qu’à la fin des jours de sa jeunesse, les Mages ayant observé que son astre pâlissait, Iskender parcourut l’Iran, cherchant la Fleur d’Immortalité. — Le soleil séjourna trois fois dans ses douze demeures sans qu’il la trouvât, jusqu’à ce qu’il parvint enfin aux extrémités de la Terre, au point où elle ne fait plus qu’un avec la mer et les nuages. — Et là, sur les degrés qui conduisent aux parvis d’Ormuzd, une Péri était étendue dormant dans sa robe de pierreries. Une étoile scintillait au-dessus de sa tête, son luth reposait sur son sein et dans sa main la Fleur brillait. — Et c’était un lotus pareil à l’émeraude. ondoyant comme la mer au soleil du matin. — Iskender se pencha sans bruit vers la Dormeuse et, sans l’éveiller, lui ravit la Fleur. — Qui devint soudain,entre ses doigts, comme le ciel de midi sur les forêts du Ghilan. — Mais la Péri, ouvrant les yeux, frappa les paumes de ses mains l’une contre l’autre et poussa un grand cri. — Car elle ne pouvait, à présent, remonter vers la lumière d’Ormuzd. — Cependant, Iskender, la considérant, admira son visage qui surpassait en délices celui même de Gurdaferrid. — Et il la convoita dans son cœur. — De sorte que la Péri connut la pensée du Roi. — Car dans la droite d’Iskender, le lotus s’empourpra et devint la face du désir. — Ainsi, la servante des Purs sur que cette fleur de Vie ne lui était pas destinée. — Et pour la ressaisir s’élança, légère comme l’abeille. — Pendant que le Seigneur Invincible éloignait d’elle le Lotus, partagé entre sa soif d’immortalité et la délectation de ses yeux. — Mais la Péri dansa la danse des Péris. — S’approchant toujours davantage, jusqu’à ce que son visage touchât le visage d’Iskender. — Et qu’à la fin il lui rendit la fleur sans regret. — Alors le lotus sembla de neige et d’or comme la cime de l’Elbourz au soleil du soir. — Puis la forme de la Péri parut se fondre dans la lumière émanée du calice et bientôt plus rien n’en fut visible, si ce n’est une main, élevant la fleur de flamme, qui s’effaçait dans la région supérieure. — Iskender la vit disparaître. — Et comprenant que, par là, lui était signifiée sa fin prochaine. — Il sentit l’ombre l’entourer.

Après les scintillants effets orchestraux du mouvement « Lent » initial, le thème principal est chanté par les altos et accompagné selon une formule qui est celle des « pierreries » du premier acte d’Ariane et Barbe-Bleue. Les multiples complications instrumentales et les nombreuses modulations qui suivent ramènent les effets du début. Puis la tonalité évolue vers ré bémol majeur et l’orchestre entier scintille vivement quand réapparaît, plus expressif, aux violons, flûtes et célesta, le thème directeur qui se poursuit jusqu’à la danse. Celle-ci, d’abord langoureuse, puis plus agitée, toujours fidèle traductrice de la pensée littéraire, s’adorne de glissandos de harpe, de graciles notes de célesta et de toute la féerie orchestrale moderne. Le mouvement, s’exagérant, devient scherzo, et le début de l’œuvre réapparaît pour se fondre dans le thème de la danse.

Décors et costumes de M. R. Piot.

[GC3-445]


Ce poème dans est dédié à Mlle Trouhanowa, qui en fut l’interprète lors de la première représentation donnée en avril 1912 au Châtelet. « Au lieu de l’influence tout extérieure et superficielle des brillants poèmes symphoniques de Balakirew iu de Rimsky-Korsakow qu’on voulut y relever — estime M. G. Samazeuilh — c’est bien plutôt l’assimilation intelligente de la conception si nouvelle des rapports de la musique et de la danse dans la deuxième version du Vénusberg, qui caractérise ce divertissement supérieur où se complut la fantaisie d’un grand musicien! »

Dans un préambule à 6/8, mystérieusement des accents de cors répondent à des grésillements de flûtes, sur des tenues du quatuor et un mi pédale, le tout teinté de quelques harmoniques de harpes. Puis, un long et doux appel en fanfare commence, piano, à se développer.

(Le héros Iskender est parvenu aux extrémités de la terre, cherchant toujours vainement la Fleur d’Immortalité. Il est maintenant arrêté devant les parvis d’Ormuzd. La Péri s’est endormie là. La Fleur brille à sa main.)

Le premier appel d’ensemble des trompettes, des bois et cors est orné de trilles des violons, de traits de clarinette, et appuyé par une harpe. Un motif prépondérant paraît alors, et les cors et violoncelles le chantent, à 6/8 en animant. Des dessins prestes l’enserrent. Flûtes, clarinettes, altos et violons le redisent (ex. a). Il alterne avec le thème de sonnerie. Les harpes et les timbales ajoutent leurs notes apaisantes, puis toujours dans la teinte douce, les traits ornementaux s’exaspèrent et se multiplient.

(Et la Fleur était un lotus, pareil à l’émeraude, ondoyante comme la mer au soleil du matin.)

La progression sur le motif (a) gagne bientôt en intensité. Alors, la fanfare du début se juxtapose à lui. Les violons et le celesta tracent cette fois son contour avant un animé plus fervent, mais toujours assez discret.

[Exemples a à d]

(Iskender se pencha sans bruit vers la Dormeuse et, sans l’éveiller, lui ravit la Fleur, qui devint soudain entre ses doigts comme le ciel de midi sur les Forêts du Ghilan.)

Ici l’éclat orchestral commence à rougeoyer aussi. Dès la modulation de ré bémol, les flûtes trillents à l’aigu, les trompettes en sixtes chromatisent, orgueilleuses, les hautbois et clarinettes leur répliquent en sens contraire; toute la batterie se multiplie, ou pour mieux dire se divise; le bouillonnement s’apaise dans un grand tutti, construit sur une forme agrandie du premier thème (ex. b).

(Mais la Périe, ouvrant ses yeux, frappa les paumes de ses mains l’une contre l’autre et poussa un grand cri. Car elle ne pouvait, à présent, remonter vers la lumière d’Ormuzd. Cependant, Iskender, la considérant, admira son visage qui surpassait en délices celui même de Gurdaferrid. Et il la convoita dans son cœur. De sorte que la Péri connut la pensée du Roi. Car, dans la droite d’Iskender, le lotus s’empourpra et devint comme la face du désir.)

Cette admiration d’Iskender pour la Péri subit, musicalement, une prompte évolution. Après avoir plané, violente, elle subit, par dégradations successives, les attaques du motif (b), très enveloppant, jusqu’à ce que celui-ci disparaisse dans la danse (motif c aux violons, flûtes et cors avec sourdine). Les sinuosités harmoniques sont brusques, nombreuses. La parure instrumentale varie à chaque présentation de la phrase. La harpe et au triangle, épicent les alinéas successifs.

(La Péri danse pour séduire le ravisseur de la Fleur.)

Les cors doublent le quatuor, avivent la sonorité d’un motif tiré du début de la phrase (c). Les pizzicati et les traits extrêmes de flûtes accompagnent la période suivante du développement de la danse, resplendissante aux bois (ex. d), et toujours panachée de mille ingrédients de rythmes et de couleurs. Mais Iskender, cédant aux charmes de la danseuse, lui restitue, sans regret, le Lotus, de neige et d’or, comme la cime de l’Elbourz au soleil du soir.

(Alors la forme de la Péri parut se fondre dans la lumière émanée du calice et bientôt plus rien n’en fut visible, si ce n’est une main, élevant la fleur de flamme, qui s’effaçait dans la région supérieure. Iskender la vit disparaître. Et, comprenant que, par là, lui était signifiée sa fin prochaine. Il sentit l’ombre l’entourer.)

Dans cette péroraison, de funèbres fanfares de trompettes et trombones alternent avec des rappels des premières mélodies et avec d’analogues accents des cors qui ont retenti dans la préface.

[GC5-90]


Le poème chorégraphique, dansé en 1912 par Mlle Trouhanova, au Châtelet, s’inspire d’une légende orientale dont voici le résumé: Iskender parcourt l’Iran à la recherche de la Fleur d’immortalité. Sur les degrés qui conduisent aux parvis d’Ormuzd, une Péri est endormie tenant un lotus qu’Iskender lui ravit. La Péri pousse un cri, tandis qu’Iskander la considère et la convoite. Elle danse et reprend la fleur, puis disparaît. Iskander «comprenant que par là lui était signifiée sa fin prochaine» «sentit l’ombre l’entourer».

[GC25-209]

Artiste impliqué
Nom Part Fonction Id éditeur Genre
Paul Dukas Compositeur M