Informations
Titre en français : Psaume XLVII
Numéro de catalogue : op 38
Année de composition : 1904
Instrumentation (fr) : orgue, chœur, orchestre
Instrumentation (en) : organ, chorus, orchestra
Notice (fr) : Cette œuvre pour orgue, orchestre et chœurs, est datée de Rome 1904 et dédiée à Paul Bigot, architecte du Palatin, pensionnaire de la Villa Médicis quand y fréquentait M. Fl. Schmitt, qui eut son grand prix de Rome en 1900. Malgré la traduction de Lemaître de Sacy, malgré la collaboration des saints psalmistes, malgré tout ce parrainage sacré et archi-classique, l’auditeur ne pourra, croyons-nous, trouver dans cet ouvrage qu’une lointaine transcription de l’original. Il y verra sans nul doute une pensée toute moderne quant au fond de la conception, et en retirera certainement des impressions toutes modernistes quant aux formes employées. Il est même remarquable que, dans un texte au premier abord si concis et si rigide, les esprits les plus différents puissent trouver un aliment à leur convenance, et riche en symboles ennemis. C’est, d’ailleurs, ce qui assure au Livre des Psaumes, parmi les beautés éparses dans chaque partie de la Bible, cette impassible pérennité.

 

Voici une rapide revue des thèmes et de leurs principales physionomies vocales :

 

Une explosion de joie ardente commence le Psaume des enfants de Coré. Voici l’attaque des soprani (1) sur les paroles Gloire au Seigneur!

 

[Exemple 1]

 

Le sol est la note supérieure d’un accord de neuvième dominante mineure de si, qui s’agrège par entrées successives des voix, les basses divisées en dernier ressort. Cette louange un peu brutale, soldatesque même, du Seigneur, est entendue par deux fois. Elle laisse place à une exubérance plus amène sur ce motif : « Nations! Nations! Nations! Frappez des mains! (ter) toutes ensemble! » Frappez des mains! (2)

 

[Exemple 2]

 

Des arpèges légers sur les temps appuient seuls les voix dans ce 5/4. L’enthousiasme qui s’en dégage se traduit ensuite à l’orchestre par la Danse sacrée suivante (3) :

 

[Exemple 3]

 

Ce motif sert de lien entre le thème (I) qui a reparu et le choral grandiose que le grand orgue soutient de toute sa puissance. (4) Parce que le Seigneur est très élevé et très redoutable.

 

[Exemple 4]

 

Comme un commentaire nouveau de ces paroles, une fugue presque scolastique fait mine de se développer. Son sujet est imposé par les basses (5) répétant : « Parce que le Seigneur est très élevé et très redoutable! »

 

[Exemple 5]

 

À remarquer que l’entrée des ténors est soulignée par un trombone impérieux.

 

Toutes les voix unies à deux octaves clament en conclusion la phrase (6) où s’exprime congrûment la gloire du Sabaoth « Il nous a assujetti les peuples, il a mis les nations sous nos pieds ».

 

[Exemple 6]

 

Une courte méditation symphonique intervient ici, transition importante, qui est peut-être une clé pour qui chercherait à pénétrer les intentions symboliques ou les vues philosophiques du musicien. Sur un dessin syncopé des altos divisés, le violon solo, auquel riposte le basson, puis le cor anglais, fait planer une Douceur nouvelle et simple dans ce tableau lyrique, où l’exaltation guerrière a jusqu’alors triomphé.

 

[Exemple 7]

 

À la manière forte, voici, à notre avis, que s’oppose le pressentiment d’une Victoire toute autre et plus pure. Le dieu fort et violent qui a rangé les peuples sous l’Unique puissance va-t-il nous révéler un dessein plus auguste encore? « Il a choisi dans son héritage la beauté de Jacob qu’il a aimée. » (8) :

 

[Exemple 8]

 

C’est le soprano solo qui reprend le thème (7), tandis que les chœurs posent le motif (8), accompagné d’un balancement tranquille des cordes avec sourdine. Dès ce moment va commencer un long et très varié decrescendo. Par gradations et par sursauts subtils, avec de longues vagues sonores, et des moutonnements discrets et mystérieux, l’orchestre nous mènera d’une grave et haute douceur (où les trompettes très voilées et les cors bouchés, mais combativement incisifs, trouent la Paix adorable des bois chantants), jusqu’à la sereine et lointaine vocalise des chœurs (9) :

 

[Exemple 9]

 

À distance de croche chacune, les voix encore poussent un soupir étrange, sur un second renversement de septième dominante de ré, pendant qu’une harpe agile égrène, comme une rose à l’automne, ses pétales délicats…

 

L’harmonie redit dans sa disposition première le thème (1). Et c’est seulement qu’apparaît une transformation radicale de ce chant de gloire; elle consiste simplement dans la présentation de son mouvement contraire. Il s’étage aux voix, couvrant de larges sextolets bénisseurs, et poursuit sa marche noble sur des accords parfaitement consonnants, qui contrastent pleinement avec les premières harmonisations du thème (1). Et le chœur s’exprime ainsi (10) : « Dieu est monté, Dieu est monté au milieu des chants de joie! »

 

[Exemple 10]

 

Cette idée terminale aboutit à l’entrée en force des trombones. Dans cette dernière partie circule aussi presque continuellement le motif rythmique de la danse (3). Elle ajoute sa note — dirons-nous sarcastique — à l’ensemble chaud et énergique. L’unité de pensée qui préside à l’œuvre pourrait encore s’éclairer par l’étude des évolutions tonales, moins fantaisistes qu’on ne le pourrait supposer à première vue. Mais ceci dépasserait le cadre d’une simple notice sur le temple biblique et vingtième siècle de M. Fl. Schmitt.

 

[GC3-335]

Artiste impliqué
Nom Part Fonction Id éditeur Genre
Florent Schmitt Compositeur M