Titre en français : | Symphonie antique |
Numéro de catalogue : | op 83 |
Année de composition : | 1911 |
Instrumentation (fr) : | chœur, orgue, orchestre |
Instrumentation (en) : | chorus, organ, orchestra |
Notice (fr) : | Cet ouvrage, qui est l’opus 83 de M. Widor, a été joué pour la première fois le 22 mars 1911 dans la salle de l’Hôtel de Béarn; c’est aujourd’hui la première audition dans un grand concert public. En voici l’épigraphe : « La légende attribue à l’improvisation de Sophocle, au soir de Salamine, le thème de cette symphonie. Les paroles primitives (Hymne qui rendait grâce aux Dieux de la Victoire) ne nous sont pas parvenues; le texte latin (Te Deum laudamus) a été substitué au texte grec par saint Ambroise et saint Augustin. » L’idée-mère qui a engendré cette symphonie est donc de première origine païenne. Et nous ne croyons pas aller contre la pensée de l’auteur en disant que, malgré la sainte adaptation liturgique, un parfum hellénique et panthéiste est demeuré dans les plis de la mélodie initiale. En considérant le haut développement que le musicien lui a donné ici, nous tromperions-nous en voyant dans toute l’œuvre l’évocation double et grandiose de deux mondes respectueusement représentés, l’un près de l’autre, en des fresques aux contours libres et amples? Malgré les commentaires fervemment lyriques du texte latin, et l’orthodoxie de leur sonore symbolisme, malgré l’explosion d’une foi vivante, ou à cause même de cet enthousiasme, il semble que se révèle en ces pages une vision philosophique du monde, sortant du cadre thématique de l’œuvre en s’efforçant à réaliser une synthèse morale universelle. La conclusion sur les paroles : Lauda ducem et pastorem in hymnes et canticis décèlent une joie rare et une robustesse de pensée qui viendraient à l’appui d’une analyse approfondie et psychologique faite dans le sens que nous indiquons plus haut. Mais une semblable étude laisserait trop d’importance à l’interprétation personnelle et nous ne voulons pas nous y aventurer car nous n’avons que de très vagues indications de l’auteur que nous nous contenterons d’utiliser pour la rédaction d’un aperçu analytique succinct : I. — La première partie est Allegro moderato à quatre temps. Dès la quatrième mesure, les cors, sur un trémolo des violons et alto, entonnent le magnifique thème du Te Deum laudamus in æternum, (A) : [Exemple 1] Aussitôt, après trois fusées des flûtes et des cors, un intéressant travail s’opère sur la seconde période du fragment. Présentée en valeurs diminuées dans les divers timbres, elle s’adonne de motifs accessoires qui concourront dans tout le mouvement à la jonction des divers éléments. Ces différentes figures mélodiques, après un ensemble sur le thème (en ré mineur) mènent par un trait des violons à une nouvelle formule qui est un thème très important dans le développement qui va suivre, (B) : [Exemple 2] C’est d’abord le thème (A) qui fait les frais du développement. Il s’amalgame ensuite dans la seconde idée, celle-ci donnant une physionomie plus inquiète à l’ensemble et déterminant bientôt, quand les contrebasses ont dessiné un mouvement d’ascension secondés par les cordes agiles, le retour dans la force —aux cuivres — du Te Deum. Les violons font rage cependant, et les bois soutiennent de longs accords. Après un bref épisode rythmique, c’est la péroraison où il faut remarquer le fréquent emploi de la contrebasse en dessins expressifs. Ensemble terminal de mâle grandeur. II. — L’Adagio proprement dit est précédé de 8 mesures où les bois rappellent le thème (A) dans une forme plus simple. Alors, en fa dièze, c’est une noble méditation du quatuor, dans la région grave. Les bassons, la flûte, puis le hautbois, entrent à leur tour pour répéter cette phrase qui, conservant son rythme presque immuable, prend des teintes diverses par les modifications de son dessin mélodique. Son éclatant développement, où apparaissent des syncopes aux cuivres, est brusquement interrompu par le retour de l’idée initiale, dans la douceur d’un motif à la flûte, s’ébattant sur une trame tissée par les clarinettes. Émergent aussi le basson et le violoncelle solo appelant le reste du quatuor vers un Andante à 2/4. Là, le hautbois et la clarinette attaquent le début du Lauda Sion : (sol si bémol do si bémol, mi ré do si bémol) au-dessus des mouvements discrets du quatuor, qui font songer à des chuchotements de prières dans la foule. Une pureté de lignes et de sonorités ici s’étale complaisamment, donnant l’impression de la candeur dans une enthousiasme lumineux et calme. Le thème passe aux cordes, clarinettes et basses unis, tandis que le reste des instruments commente par des dessins plus rapides cet élan lyrique qui grandit et s’exaspère peu à peu jusqu’à l’entrée fortissimo des cuivres. Puis le retour de l’Adagio se fait et quatuor et bois se donnent la réplique. Le thème (A) sert encore de transition, et le Te Deum s’éteint dans une stupeur vide, où résonne seulement comme des pulsations à peine perceptibles… Roulement de timbales, tenue des cors et accord sec forte effaçant brutalement la vision de procession… III. — Moderato. Tandis que babille en sourdine le quatuor, la flûte psalmodie le Lauda Sion. Le quatuor des cors y répond, et les violoncelles esquissent des ripostes vives en diminution. Apparaît alors le thème du morceau, rythmes très accusés, tirés d’un petit épisode du premier mouvement. Un dessin persistant aux violons l’accompagne quand les cors en fanfare le promulguent. Un tumulte naît et grandit sur le motif du Lauda Sion. Il faudrait ici suivre mesure par mesure les colorations dues à la richesse de palette et aux mélanges de rythmes. L’interprétation intensive et ésotérique des hymnes, les mélodies découlées de chacun de leurs fragments, et leurs superpositions, mènent jusqu’à une conclusion rapide mais somptueuse. IV. — Ici, c’est une succession d’épanchements lyriques sur les versets du Te Deum. Le mouvement Moderato s’ouvre par des appels de flûte sur des arpèges très doux des violons. Le hautbois amorce une gamme qui passe à la clarinette, aux violons, au cor. Puis violoncelles et contrebasses chantent l’entrée initiale du grand thème, suivis par les bassons et les cors. Dans la plus grande douceur entrent les soprani du chœur. Survient un crescendo général et les hommes répondent à l’unisson dans la force : Te Æternum patren omis terra veneratur. Le Lauda Sion contraste, douloureux. Le plein sunt cœli est chanté par le chœur solo dans l’extrême douceur, après un soprano lointain qu’une harpe accompagne d’un dessin en croches. De glorieux tutti et maints épisodes se succèdent. Voici, au violon, une phrase de supplication (D) : [Exemple 3] Après une entrée fuguée sur les paroles : « Venerandum tuum verum et unicum Filium, Sanctum quoique Paraclitum », le thème du Te Deum se présente sous un nouvel aspect très expressif. Tandis que se déroulent les versets laudatifs suivants, l’orchestre, toujours indépendant des voix, prépare l’exposition et le développement d’une fugue sur le « Lauda Sion ». À partir de ce moment, les combinaisons de thèmes et de rythmes deviennent plus complexes. Les voix, parmi les sinuosités de l’orchestre, se glissent en bloc, ou en entrées successives, gardant toujours la ligne mélodique, malgré leurs accentuations originales et les enchevêtrements multiples du chœur et de l’orchestre. Avant la conclusion, deux voix lointaines, soprano et alto soli, sur des arpèges, implorent le Seigneur : « Die isto, dignare, Domine, sine peccato nos custodire! Daigne en ce jour, Seigneur, nous garder du péché! » L’œuvre se clôt par un choral aux accents énergiques et trompants, soutenu par une fanfare de trompettes et par les accords larges et vigoureux de l’orchestre. [GC3-188] |
Nom | Part | Fonction | Id éditeur | Genre |
Charles-Marie Widor | Compositeur | M |