Trois éléments mélodiques sont en général utiles pour un mouvement de sonate : une phrase et deux rythmes ou deux phrases et un rythme. Mais leur présentation, leur enchevêtrement, leur nature propre n’ont souvent qu’un intérêt médiocre ou du moins purement technique. Ici, sans être ébloui par l’une ou l’autre de ces qualités primordiales, on est forcé de se laisser convaincre par l’aisance de chacune et le brio de leur réunion.

I. Deux phrases, l’une haletante, timide, en demi-teintes tendres, à côté de laquelle frémit un bourdonnement chromatique; l’autre, plus fière et très expansive; elles déroulent leurs anneaux aux couleurs tonales fort changeantes, dans une atmosphère de fièvre lyrique, qui n’est pas sans grandeur. Détail à noter : l’élément principal du second thème éclate avant les accords finaux de mi bémol mineur, et ceci entre deux courts points d’arrêts significatifs.

II. Le deuxième mouvement se recommande par la libéralité de ses modulations. C’est surtout un thème tranquille, avec variations, variations autour desquelles déclame une autre idée plus capricieuse dans ses desseins.

III. Effets de sonorité, basses moelleuses, haltes claires au milieu de l’échevellement d’une sombre course, pleurs paisibles, stoïcisme peut-être, en somme beaucoup de poésie en puissance dans ce scherzo.

IV. Ce Très lent s’ouvre sur de solennelles et véhémentes imprécations. Un drame, une crainte effrayante? Puis monte un apaisement qui va se transformer dans une modulation en si mineur. Le thème principal prend une couleur énergique en si souvent majeur. Un moment de langueur étonnée lui succède. Le chromatisme s’exaspère dans la conclusion. La coda originale a de la peine à clore sur un mi bémol, mais elle y parvient.

[GC3-338]