Notice (fr) : |
Ces trois Ballades viennent de paraître (Durand, édit.). La première «de Villon à s’amye» est écrite sur un rythme à 4/4, Triste et Lent, «avec une expression où il y a autant d’angoisse que de regret». Ballade de Villon à s’amye Faulse beauté, qui tant me couste cher, Rude en effect, hypocrite doulceur, Amour dure, plus que fer, à mascher; Nommer te puis de ma deffaçon sœur. Charme felon, la mort d’ung povre cueur, Orgueil mussé, qui gens met au mourir, Yeulx sans pitié! ne veult droict de rigueur, Sans empirer, ung povre secourir? Mieulx m’eust valu avoir esté crier Ailleurs secours, c’eust esté mon bonheur : Rien ne m’eust sceu de ce fait arracher; Trotter m’en fault en fuyte à deshonneur. Haro, haro, le grand et le mineur! Et qu’est cecy? mourray sans coup ferir, Ou pitié peult, selon ceste teneur, Sans empirer, ung povre secourir. Ung temps viendra, qui fera desseicher, Jaulnir, flestrir, vostre espanie fleur : J’en risse lors, se tant peusse marcher, Mais las! nenny : ce seroit donc foleur, Vieil je seray; vous, laide et sans couleur. Or, beuvez fort, tant que ru peult courir. Ne donnez pas à tous ceste douleur, Sans empirer, ung povre secourir. Prince amoureux, des amans le greigneur, Vostre mal gré ne vouldroye encourir; Mais tout franc cueur doit, par Nostre Seigneur, Sans empirer, ung povre secourir. Ballade que Villon fait à la requeste de sa mère pour prier Notre Dame Dans la ballade «pour prier Notre-Dame», le rythme à 4/4 est souvent coupé, comme il se produit dans la première Ballade. Dame du ciel, régente terrienne, Emperière des infernaulx paluz, Recevez-moy, vostre humble chrestienne, Que comprinse soye entre vos esleuz, Ce non obstant qu’oncques riens ne valuz. Les biens de vous, ma dame et ma maistresse, Sont trop plus grans que ne suys pecheresse, Sans lesquelz bien ame ne peult merir N’avoir les cieulx, je n’en suis menteresse. En ceste foy je vueil vivre et mourir. À vostre Filz dictes que je suys sienne; Ou comme il frit au clerc Théophilus, Lequel par vous fut quitte et absoluz, Combien qu’il eust au diable faict promesse. Preservez-moy que je n’accomplisse ce! Vierge portant sans rompure encourir Le sacrement qu’on celebre à la messe. En ceste foy je vueil vivre et mourir. Femme je suis povrette et ancienne, Qui riens ne sçay, oncques lettre ne leuz; Au moustier voy dont suis paroissienne, Paradis painct où sont harpes et luz, Etang enfer où damnez sont boulluz : L’ung me faict paour, l’aultre joye et liesse. La joye avoir fais-moy, haulte Deesse, A qui pecheurs doibvent tous recourir, Comblez de foy, sans faincte ne paresse. En ceste foy je vueil vivre et mourir. Ballade des Femmes de Paris Le caractère de la troisième Ballade est tout à fait différent de ceux des précédentes. Elle est écrite sur un rythme sautillant, à 2/4, alerte et gaie. Quoy qu’on tient belles langagières Florentines, Veniciennes, Assez pour estre messaigières, Et mesmement les anciennes; Mais, soient Lombardes, Romaines, Genevoises, à mes périls, Piemontoises, Savoysiennes, Il n’est bon bec que de Paris. De beau parler tiennent chayères, Ce dit-on Napolitaines, Et que sont bonnes cacquetières Allemandes et Bruciennes; Soient Grecques, Egyptiennes, De Hongrie ou d’aultre païs, Espaignolles ou Castellannes, Il n’est bon bec que de Paris. Brettes, Suysses, n’y sçavent guères, Ne Gasconnes et Tholouzaines; Du Petit Pont deux harangères Les concluront, et les Lorraines, Anglesches ou Callaisiennes, (Ay-je beaucoup de lieux compris?) Picardes, de Valenciennes… Il n’est bon bec que de Paris. Prince, aux dames parisiennes, De bien parler donnez le prix; Quoy qu’on die d’Italiennes, Il n’est bon bec que de Paris. [GC2-257] |