Notice (fr) : |
Par le biais de l’observation et de la réflexion, Ozias Leduc faisait de son art et de sa vie «une quête de l’unité des choses, une aventure consciente des sens». (Robert Bernier, Un siècle de peinture au Québec, Montréal, Les Éditions de l’Homme, 1999, p. 67.) Pour mon œuvre, je me suis inspiré de ce regard, tant plastique que spirituel, porté par Leduc sur le mont Saint-Hilaire et ses paysages environnants. Entre 1913 et 1921, il peint à ce sujet une série de toiles de caractère symboliste, dont la dernière se nomme L’heure mauve. J’ai choisi ce titre parce qu’il traite du temps et de la couleur, deux composantes suffisant à résumer une randonnée à la montagne, de l’aube au crépuscule. Dans le cadre de ma pièce musicale, l’idée de couleur fait directement référence à la matière, dont Leduc avait une vision très moderne. Pour lui, «un grand principe doit présider à toute œuvre d’art: “adapter la matière à sa fin propre”. C’est donc traiter une substance selon ses exigences et selon son pouvoir». (Ozias Leduc, une œuvre d’amour et de rêve, catalogue d’exposition (Québec: Musée du Québec; Montréal: Musée des Beaux-arts de Montréal, 1996), p. 25.) Au même titre, Leduc croit que la «fin propre» de chaque individu doit être respectée. Borduas a ainsi pu dire de son maître: «Je lui dois l’une des rares permissions de poursuivre mon destin». (Paul-Émile Borduas, Quelques pensées sur l’œuvre d’amour et de rêve de M. Ozias Leduc, in Écrits I (édition critique par André-G. Bourassa, Jean Fisette et Gilles Lapointe), Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, 1987, p. 513.) La dimension du temps, quant à elle, rend compte de l’évolution de la matière et de sa patiente observation. Ozias Leduc a vécu 90 ans (1864-1955) et on le disait d’une lenteur proverbiale; Riopelle raconte que le bois de chêne dont était faite la table dans son studio provenait d’un arbre qu’il avait lui-même planté jadis… Envisagé de cette façon, le temps se trouve naturellement empreint d’une valeur spirituelle. Peintre, penseur, poète, épistolier, président de commission scolaire, conseiller municipal et pomiculteur, Leduc sut aussi bien collaborer avec les politiciens, les représentants du clergé et les artistes d’avant-garde que ses concitoyens. Dans sa sagesse et sa diplomatie, il semble toujours avoir perçu les divergences d’opinions de ses contemporains comme autant de facettes d’un tout indissociable. Cette vision se trouve résumée dans un discours prononcé par Leduc en 1930 à la Société d’histoire de Saint-Hyacinthe: «J’ai tâché de rendre mon art vivant, en considérant notre petite patrie, Saint-Hilaire, comme une entité qui serait notre œuvre d’art et que tous ensemble, ses habitants, œuvrant d’accord, nous devons perfectionner et embellir!» (Cité dans le Cahier d’histoire de la Société d’histoire de Beloeil-Mont-Saint-Hilaire, «Hommage à Ozias Leduc», 17e année, no 49, février 1996.) Ayant résidé dans cette région, j’ai, en quelque sorte, écrit mon œuvre en réponse à son appel. |
Notice (en) : |
Through observation and reflection, Ozias Leduc made his art and life “a quest for the unity of things, a deliberate adventure of the senses.” (Robert Bernier, Un siècle de peinture au Québec, Montreal, Les Éditions de l’Homme, 1999, p. 67. [English translation: Alexis Diamond]) For this work, I took inspiration from the gaze, as much plastic as spiritual that Leduc directed towards the Mont Saint-Hilaire and its surrounding landscapes. Between 1913 and 1921, he painted a series of Symbolist canvases on the subject, the last of which is entitled Mauve Twilight. I chose this title because it addresses both time and colour, two components sufficient to summarize a mountain hike, from dawn until dusk. In terms of this piece of music, the idea of colour makes direct reference to matter, of which Leduc had an extremely modern vision. In his mind, “All works of art should be governed by this basic principle: ’Adapt matter to its particular purpose.’ This means treating a substance according to its requirements and its capacity.” (Ozias Leduc, an Art of Love and Reverie, exhibition catalogue, Quebec: Musée du Québec; Montreal: Montreal Museum of Fine Arts, 1996, p. 25.) At the same time, Leduc believed that the ultimate goal of each individual must be respected. Borduas was able to say of his master: “I owe him that rare permission to pursue one’s own fate.” (Paul-Émile Borduas, “Some Thoughts about the Work of Love and Dream[s] of Monsieur Ozias Leduc”, Écrits/Writings 1942-1958, introduced and edited by François-Marc Gagnon, translated by François-Marc Gagnon and Dennis Young, Halifax, Nova Scotia College of Art and Design, 1978, p. 113.) The dimension of time captures the development and patient observation of matter. Ozias Leduc lived until the age of ninety (1864-1955), and one might say he did so with proverbial slowness; Riopelle once said that the oak wood used to make the table in Leduc’s studio came from a tree he once planted himself… Depicted this way, time is naturally imbued with a spiritual quality. Artist, thinker, poet, letter writer, president of school commission, city councilor, and apple grower, Leduc also knew how to collaborate with politicians, representatives of the Church, and avant-garde artists as well as citizens. In his widom and diplomacy, he also seemed to perceive the diverging opinions of his contemporaries as facets of an inseparable whole. This vision is summarized in a presentation Leduc made to the Saint Hyacinth Historical Society, in 1930: “I tried to make my art come alive, by considering our little hometown, Saint Hilaire, as an entity that would be our work of art and that everyone, all of its inhabitants, working in concert, would perfect and improve!” (Cited in “Hommage à Ozias Leduc”, in the Cahier d’histoire of the Beloeil-Mont-Saint-Hilaire Historical Society, 17th year, N. 49, February 1996. [English translation: Alexis Diamond]) Having lived in the region myself, I wrote the work as a response to his call. |