Cependant, cette intelligence ne lui a pas suffi pour exercer une authentique royauté. Il est à peine le contremaître de la Création, poste qu’il exerce avec l’aide du fouet, la rêne, les éperons, le fusil et les insecticides. Le mec calomnie le scorpion quand il le compare avec son prochain envenimé. Pourtant le plus actif des scorpions, l’«Androctonus occitanus» est morose, solitaire et timide. Quand elle se trouve face à une situation surmontable, cette bête, dans une superbe héroïque, enfonce l’aiguillon envenimé de sa queue dans son propre corps et elle se suicide. Quand quelqu’un s’obstine dans ses idées, oublie autrui et n’aide personne, le mec l’appelle chien. Cependant le chien est le meilleur ami de l’homme et le seul être qui se gratte vers l’extérieur.

Quand le mec veut traiter quelqu’un d’imbécile, il dit: «il n’est même pas capable de tuer une mouche». Comme si c’était plus facile de tuer une mouche qu’un être humain! D’ailleurs, la mouche Drosophilæ a été une grande collaboratrice dans les études sur la génétique.

Quand quelqu’un est nul on l’appelle âne. Pourtant l’âne a servi de 4x4 à l’homme pendant des siècles, et son lait a servi de crème hydratante à l’impératrice Popea Sabina.

Si le mec veut propager l’insignifiance d’un de ses semblables, il dit «c’est un insecte». Pourtant, lui-même n’est jamais sorti victorieux dans sa lutte contre la langouste, le moustique ou les poux! Pour exprimer son mépris le plus profond pour l’individu malhonnête et crapule, le mec l’appelle: rat. Cependant le rat sert à étudier beaucoup des comportements du mec même… à cause de la ressemblance des réactions vitales entre la bête et lui. Les méduses servent de nourriture aux harengs, les harengs sont le repas des phoques et les phoques sont le menu des ours. Si les méduses n’existaient pas, les harengs et les phoques mourraient de faim. Mais les ours, eux, ne se résignent pas à mourir de faim donc, ils envahiraient la terre à la recherche de nourriture. C’est ainsi que la nature a fait les méduses pour sauver les villes de l’invasion des ours.

Cette pièce est destinée donc, à «ré–anoblir» la condition des animaux qui ont tant contribué au développement de la condition humaine. Basé sur des textes de l’écrivain-journaliste (et humoriste) Wimpi, dans El gusano loco (Éditions Freeland, Buenos Aires. 1976).